Le bateau quitte le terminal maritime à 11 heures. Après avoir passé la journée à bord, je descends du pont le lendemain matin pour être accueillie par une fraîche brise tropicale. Lorsque j'aperçois des bonites à ventre rayé plongeant dans les eaux bleu cobalt, je comprends que j'ai changé de monde.
Au moment de pagayer vers la mer en kayak, je suis accueillie par toutes sortes d'habitants marins. Des poissons volants s'arquent au-dessus de l'eau et des tortues de mer dérivent à travers les vagues. À l'horizon, une baleine et son petit sautent au-dessus de l'eau. La mère voltige vigoureusement hors de l'eau, son petit la suit en formant un petit arc d'eau. Elle plonge son corps majestueux dans la surface océanique tandis que son baleineau s'y abandonne en silence. Peut-être s'entraînent-ils à faire des acrobaties, ou bien, tout simplement, jouent-ils ensemble.
Arrivée au large, j'aperçois des dauphins en liberté.
Je suis guidée par George, un insulaire d'origine euro-américaine. Il fait partie des descendants d'Occidentaux ayant immigré dans les îles Ogasawara au XIXe siècle. Ils parlent leur propre dialecte, un mélange de japonais et d'anglais, et constituent une société multiethnique encore méconnue.
Au signal de George, nous plongeons dans l'eau. Aussitôt, trois dauphins apparaissent parmi l'écume. Un delphineau nage entre ses parents. Alors que nous gardons nos distances, le petit s'approche tranquillement vers nous. Il semble n'avoir aucune appréhension. Ne sachant que faire, Georges et moi restons figés lorsque l'un des parents dauphins s'interpose. Ils repartent tous ensemble, en famille, vers le bleu marin. J'entends leur cri étouffé dans mon oreille. Est-ce un avertissement ou me taquinent-ils ? Je me souviens encore de ce son étrangement chaleureux.