Japan Stories Logo

La fête des filles

Marie Ebersolt

Le 3 mars 2023

photo

Le hinamatsuri, littéralement festival de poupées, a lieu chaque année le 3 mars. Il célèbre la bonne santé des filles alors que la douceur du printemps pointe le bout de son nez. Avant que les Japonais n’adoptent le calendrier grégorien, la date coïncidait avec la floraison du pêcher, vers le mois d’avril. Aussi, cet arbre fruitier demeure le symbole de cette fête et ornent les décorations, souvent fastueuses et extrêmement détaillées. Les petites filles préparent cette festivité en installant les poupées, parfois transmises de génération en génération. 

Cette célébration fait partie des « cinq festivals de saison », le go-sekku, et correspond à chaque changement de saison. La cour impériale de l’ère Heian (794-1185) organisait des banquets avec des plats spécifiques. L’apparition des poupées arrivera plus tard, au XVIIème siècle, grâce aux dames de compagnie de la princesse Oki-ko qui lui attribuèrent des figurines et des accessoires pour qu'elle y joue. Ainsi, lorsque Okiko accède au trône, le momo-no sekku (fête de la pêche) devint officiellement hinamatsuri (festival de poupées). Depuis, les fabricants de poupées confectionnent des effigies élaborées d’impératrice, d’empereur, des membres de la cour mais également des objets du quotidien. Selon une enquête statistique du ministère de l’économie et de l’industrie japonais, il existe aujourd’hui plus de quatre-vingt fabriquants réalisant un chiffre d’affaire de 50 millions d’euros. Ces chiffres témoignent du succès actuel. 

photo

Les poupées sont disposées sur un escalier pouvant aller jusqu’à sept niveaux. Les marches sont recouvertes d’un tapis en feutre rouge sur lequel trônent les poupées ainsi que de nombreux accessoires. Tout en haut se trouvent l’empereur et l’impératrice puis, de haut en bas, trois dames de cour, cinq musiciens, deux ministres de part et d’autre d’un bol et de mochi tricolore, trois serviteurs entre deux arbres, et enfin, des objets et meubles du quotidien impérial ornent les deux derniers rangs.  Toutes les familles ne mettent pas la totalité de ces éléments. En fonction des moyens, l’envergure diffère. Cependant, elles s’assurent toujours que le couple soit présent. Certaines petites filles fabriquent elle-même les figurines avec des origamis, occasionnant ainsi un moment de convivialité et d’activité créative et pédagogique. 


photo

Les poupées ont longtemps été des artefacts, substituant la petite fille pour conjurer le sort et détourner le mauvais esprit. Au temps où la mortalité infantile étaient importante, une amulette anthropomorphe était posée sous l’oreiller de l’enfant puis jetée à la rivière ou brûlée au sanctuaire pour se défaire des maléfices qu’elle avait attirés. Cette tradition n’a pas perduré mais la superstition veut que les poupées soient rangées dès le lendemain, sous peine que la jeune fille se marie tardivement. Pendant longtemps, la mère offrait ses poupées à sa fille, composant entre autres éléments, le trousseau de mariage. Toutefois, cette transmission tend à reculer, notamment à cause de l’usure des figurines mais également en raison de l’attrait du neuf. Les offres proposées par les fabricants sont pléthoriques et variées dans les styles. 


photo

Des boissons et des plats accompagnent ce rite de passage. Le amazake, boisson de riz peu ou non alcoolisée, les hina-arare, des biscuits de riz sucrées, le chirashi, du riz surmonté de tranches de poissons crus, ainsi qu’une soupe de coquillages symbolisant les partenaires unis d’un couple.   



Marie Ebersolt

Rédactrice-traductrice